18/12/2025 reseauinternational.net  15min #299316

 Xavier Moreau et Jacques Baud visés par les sanctions de l'Ue

Nullum crimen, nulla poena sine lege  ? (Aucun crime, aucune peine sans loi)

Der Prinz : Was ist sonst  ? Etwas zu unterschreiben ?
Et encore  ? Apposer ma signature sur quoi donc ?

Camillo Rota : Ein Todesurteil wäre zu unterschreiben.
Il s'agirait de signer un arrêt de mort.

Der Prinz : Recht gern.-Nur her  ! geschwind.
Bien volontiers. Donnez  ! Et faîtes vite !

Camillo Rota (stutzig und den Prinzen starr ansehend) : Ein Todesurteil-sagt' ich.
(en désarroi, fixant le Prince). J'ai dit qu'il s'agit d'un arrêt de mort.

Der Prinz : Ich höre ja wohl.-Es könnte schon geschehen sein. Ich bin eilig.
J'ai bien entendu. Pour ma part, cela aurait déjà pu être plié. Je suis pressé.

⎯ G.E. Lessing, «Emilia Galotti», Acte I.

*

Nullum crimen, nulla poena sine lege  ? (Aucun crime, aucune peine, sans loi)

par Mendelssohn Moses

En Micronie, en Pistoriustan (1), les options s'amenuisent.

Déclarer la guerre à Vous savez Qui  ? Imposer la loi martiale  ? Euthanasier les malades, les «demeurés» et les retraités qui coûtent un pognon de dingue, afin de maintenir l'ex-Ukraine alias «Bataillon Azov» à flot ?

La Russie, c'est Big. C'est rusé, c'est froid, le hoi polloi y sait lire et écrire pas comme chez nous, et surtout, c'est armé jusqu'aux dents à la futuriste.

À y penser, l'échec en 1812 et 1941...

Imposer d'emblée la conscription obligatoire en Germanie et Frankreich, assortie de la loi martiale, pas sûr que la comédie jouera à guichets fermés.

D'où l'idée lumineuse : Une nouvelle et originale entreprise à la «Myrotvorets» (2), moins engageant que déclarer la guerre, plus cool que la loi martiale : s'attaquer au citoyen privé, isolé et dépourvu d'appui institutionnels.

Tellement plus fun de s'attaquer aux faibles, qu'aux forts !

*

Quoique depuis 2022, divers citoyens français ou allemands (3) se trouvaient déjà «sanctionnés» pour «russophilie» par l'Olympe bruxellois, la nouvelle tombée hier, selon laquelle la «punition» frapperait désormais le Cdt. Xavier Moreau et surtout, le colonel d'état-major Jacques Baud est d'un autre ordre.

Si le Cdt. Moreau, citoyen français de bonne réputation, et dont les parents vivent encore en France, est l'image même de l'honnête homme bourru et quelque peu naïf dans ses enthousiasmes (4), il serait vraisemblablement le premier à s'incliner devant Jacques Baud, officier suisse polymathe, polyglotte, brillant auteur d'études militaires ou de géopolitique, spécialiste tant du Moyen-Orient (5) que de l'ex-bloc soviétique. C'est d'ailleurs grâce à sa formidable étude sur l'ex-Ukraine parue en 2022 (6) sur le site CF2R de l'étrangement disparu Col. Denécé, que Mendelssohn a eu à connaître de Jacques Baud.

Suite à une chasse à l'homme dans la presse conforme (7) nous apprenons de la bouche de «Monsieur C'est Putin, Punaise !» Jean-Noël Barrot, que c'est à «l'initiative de la France» que «l'Europe prend aujourd'hui des sanctions contre les relais de la propagande du Kremlin et les artisans des ingérences numériques étrangères. Zéro impunité pour les ingénieurs du chaos» dont, surprise  ! les officiers francophones Moreau et Baud. (8)

Si bien, par ses affirmations, le ministre Barrot reconnaît en creux «le chaos» où les Microniens et assimilés ont plongé l'Europe, chaos dont ces deux officiers seraient fautifs (Chapeau  ! Deux âmes contre 450 millions  ! Après «oser l'amour des rondes» ils ont «osé tenter l'impossible» !), encore Barrot eût-il dû démontrer que les deux compères seraient «artisans de l'ingérence numérique» et «relais de propagande».

Que le ministre nous définisse le terme «propagande», et puis, qu'il explique comment ces deux officiers, qui doivent ignorer tout de l'informatique sauf peut-être comment allumer et éteindre leur PC, aient pu perpétrer de «l'ingérence» numérique, réservée à des pirates-mathématiciens spécialisés. Ou serait-ce trop demander ?

Trêve de confiseries, 'scusez, je voulais dire de plaisanteries... Venons-en aux choses légèrement plus sérieuses, tout de même.

Nullum crimen, nulla poena sine lege ?

Tous les systèmes de droit tant soit peu modernes, reposent sur les principes du droit naturel, dont la clef de voûte est la défense du droit à la vie du faible contre le fort, ce qui revient au droit à la vie tout court. Car le fort n'a pas besoin de droit - il prend, et tue, à loisir. Ci-dessus, la citation d'Emilia Galotti n'est pas prise au hasard.

Autre principe fondamental du droit : une loi doit être claire, connue et non-rétroactive, faute de quoi ce n'est pas une loi mais un caprice du Prince.

Autre principe fondamental de tout texte de loi, contrat ou traité : tout terme tant soit peu ambigü doit être assorti de sa définition dans le contexte précis. Savoir de quoi on parle.

Ici, le Conseil de l'Europe impose des sanctions - nous reviendrons sur leur extrême gravité plus avant - en raison d'écrits et de paroles prononcées en public, relatifs à des questions strictement militaires ou stratégiques. Ne s'agissant en aucun cas d'appels au meurtre ou autre crime, ni d'affirmations style Orson Welles (30 octobre 1938 (9)) susceptibles de déclencher une panique généralisée, ces dires relèvent strictement de l'opinion éduquée («informed opinion») prononcées par des officiers désormais citoyens privés, dont l'un est un expert reconnu des organisations internationales.

Voici le texte même de la décision (10) suivi de la liste des mécréants (11) : Document 32025R2568 : Règlement d'exécution (UE) 2025/2568 du Conseil du 15 décembre 2025 mettant en œuvre le règlement (UE) 2024/2642 concernant des mesures restrictives eu égard aux activités déstabilisatrices menées par la Russie.

Écrit en globish au syntaxe douteux - ni français, ni anglais ni même Esperanto - les 99 mots justifiant la privation des moyens de vivre sont un tissu de clichés fatigués et d'affirmations sans preuve. Afin d'éviter d'agacer le lecteur averti, Mendelssohn a simplement mis en GRAS les termes pour lesquels l'auguste Conseil n'a pas daigné fournir de définition.

Texte original du Conseil de l'Europe :

«Jacques Baud, ancien colonel de l'armée suisse et analyste stratégique, est régulièrement invité à des émissions de télévision et de radio pro-russes. Il agit comme porte-parole de la propagande pro-russe et formule des théories du complot, en accusant par exemple l'Ukraine d'avoir orchestré sa propre invasion pour adhérer à l'OTAN (12). Glenn Diesen (13) vient d'attirer notre attention à ces paroles d'Alexei Arestovitch, que le Col. Baud ne faisait que citer !

Par conséquent, Jacques Baud est responsable de mettre en œuvre ou de soutenir des actions ou des politiques imputables au gouvernement de la Fédération de Russie qui compromettent ou menacent la stabilité ou la sécurité d'un pays tiers (l'Ukraine) (dans le cas où vous ayez des doutes sur l'identité de l'ex-Ukraine (14) : en recourant à la manipulation de l'information et à l'ingérence.

Xavier Moreau est un homme d'affaires, fondateur du site web Stratpol, et un ancien officier militaire. Il fait office de porte-voix de la propagande pro-russe et pro-Kremlin et diffuse des théories du complot sur l'invasion de l'Ukraine par la Russie, en accusant par exemple l'Ukraine d'avoir orchestré sa propre invasion pour adhérer à l'OTAN.

Par conséquent, Xavier Moreau il (sic) est responsable de mettre en œuvre et de soutenir des actions ou des politiques imputables au gouvernement de la Fédération de Russie qui compromettent ou menacent la stabilité ou la sécurité d'un pays tiers (l'Ukraine) en recourant à la manipulation de l'information et à l'ingérence.

*

Sur le continent européen, si la minutie du droit positif varie, grosso modo les peines et délits se ressemblent.

Là, nos deux officiers, dès le 15 décembre et l'entrée en vigueur des sanctions Olympiennes, verront tous leurs actifs et comptes en banque en Europe gelés ; les tiers seront interdits de leur fournir des ressources financières et ils seront interdits de voyager au sein de l'UE.

Cela équivaut à la déchéance de nationalité.

Mendelssohn voit une ou deux minuscules difficultés.

Pour qu'il y ait peine, il faut qu'il y ait délit.

Or, aucun délit connu n'est reproché aux deux officiers, dont le registre de service est impeccable. À l'instar du disparu Eric Denécé, Jacques Baud est un serviteur de la patrie, qui a mis sa vie en danger pour elle à plusieurs reprises en territoire fort difficile voire en zones de guerre.

À aucun moment - sauf erreur de notre part - la Suisse a-t-elle cru bon l'accuser d'intelligence avec des puissances étrangères, ni même d'une quelconque indélicatesse éthique ou morale. Vu son rang élevé, la dangerosité de ses missions et son ancienneté, le Col. Baud a sans doute réglé à l'État suisse des centaines de milliers de francs en impôts et charges sociales.

De même, le Col. Baud ne fait l'objet - sauf erreur - d'aucune accusation en France.

Ensuite, pour qu'il y ait peine, il faut non seulement un délit, mais un jugement.

Où est le jugement, et par quel tribunal  ? (15)

D'ailleurs, qui peut nous dire quel tribunal sera compétent pour entendre les éventuels recours des officiers  ? Ou tout recours est-il impossible  ? (16)

*

Juste pour voir si nos deux officiers feront l'affaire, Mendelssohn propose que l'on examine les délits les plus graves en droit continental, et les peines associées.

D'abord, trahison et espionnage. (17)

Le seul article vaguement susceptible de concerner Xavier Moreau (car Jacques Baud n'a aucune relation, sauf erreur, avec la Russie) est l'Article 411-5 : «Le fait d'entretenir des intelligences avec une puissance étrangère, avec une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou avec leurs agents, lorsqu'il est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende».

Sauf que l'on voit mal comment Xavier Moreau - figure publique très en vue et de surcroît, plutôt bavard - pourrait communiquer des renseignements que personne en France n'aurait idée de lui fournir, d'une part et d'autre part, «porter atteinte aux intérêts fondamentaux» de la France n'est pas précisément sa raison d'être. D'ailleurs, aucune accusation en ce sens n'a été formulée.

Curieusement, la définition des «intérêts fondamentaux» vient d'être modifiée, et ce, afin de ratisser large, très large.

Article 410-1

 legifrance.gouv.fr

Article 401-1 - Modifié par LOI n°2025-268 du 24 mars 2025 - art. 5

«Les intérêts fondamentaux de la nation s'entendent au sens du présent titre de son indépendance, de l'intégrité de son territoire, de sa sécurité, de la forme républicaine de ses institutions, des moyens de sa défense et de sa diplomatie, de la sauvegarde de sa population en France et à l'étranger, de l'équilibre de son milieu naturel et de son environnement et des éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique, notamment agricole (18), et de son patrimoine culturel». (19)

Si ce n'est trahison, serait-ce haute trahison  ? Pourquoi pas, après tout - the sky's the limit  ! En fait - il faut une déclaration de guerre. Raté.

Moving on, à «association de malfaiteurs» : Article 450-1 du Code pénal. (20)

«Constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Lorsque l'infraction préparée est un crime pour lequel la loi prévoit une peine de réclusion criminelle à perpétuité ou une répression aggravée en cas de commission en bande organisée, la participation à une association de malfaiteurs est punie de quinze ans de réclusion criminelle et de 225 000 euros d'amende...».

À supposer donc que la chaîne YT du colonel Daniel Davis par exemple (21) corresponde à une association de malfaiteurs, encore faudrait-il «un ou plusieurs faits matériels».

Encore, raté, par manque de faits matériels. Damnation !

Sans parler du fait que l'amende prévue par le Code pénal (225 000 euros) est vraisemblablement bien inférieure à la valeur des actifs et liquidités détenus personnellement par ces deux officiers.

Quant à l'Italie, elle pratique effectivement la saisie définitive des biens illégalement acquis par la mafia, suite à des actes d'accusation et de procès en bonne et due forme (22) - dont aucune trace dans le cas présent.

La notion de haute trahison n'ayant plus cours en France, par acquis de conscience Mendelssohn est allé consulter le Code de Justice militaire, ce, afin de voir si les dires des deux officiers tomberaient sous sa coupe. Raté.

Par ailleurs, il se fait que le Tribunal de justice militaire siège en temps de guerre, autrement, les délits présumés seront jugés devant des tribunaux civils ordinaires dotés de chambres spécialisées en justice militaire. La minuscule difficulté ici encore, est que le Cdt Moreau n'a perpétré aucun délit - sauf erreur de notre part - passable du Code de Justice militaire. Et qu'il n'a été ni accusé ni condamné par une quelconque instance policière ou judiciaire en France.

Et à supposer qu'il l'eût perpétré, selon l'Article L252-1 dudit Code «si le défaillant est condamné pour crime ou insoumission ou désertion, ses biens, s'ils n'ont pas fait l'objet d'une confiscation, sont maintenus sous séquestre et le compte de séquestre est rendu à qui il appartient après condamnation devenue irrévocable. Durant le séquestre, il peut être accordé des secours à la femme, aux enfants, aux ascendants du défaillant, s'ils sont dans le besoin. Il est statué par ordonnance du président du tribunal judiciaire ou de première instance du domicile du défaillant, après avis du directeur des domaines».

Il ne semble pas que le Conseil de l'Europe se soit soucié des besoins de l'épouse ou parents (âgés) du Cdt Moreau, sans parler des parents du Col. Baud.

Heureusement, selon RTS (23), «Interrogé par Keystone-ATS, le Secrétariat d'État à l'économie («Seco» suisse - ndlr) a indiqué que la question de la reprise des personnes et entités ajoutées sur la liste noire de l'Union européenne ne se pose pas pour l'instant pour la Suisse».

«La Confédération a décidé le 28 février 2022, quelques jours après le lancement de l'offensive russe, de se rallier aux sanctions de l'UE liées à la guerre lancée par Moscou. Elle n'a en revanche pas adhéré au régime européen de sanctions adopté en octobre 2024 concernant les «menaces hybrides» de la Russie, à savoir les activités de déstabilisation, a expliqué le Seco».

En d'autres mots, la Suisse n'y croit pas, aux «menaces hybrides» pour une seconde.

Venons-en à la déchéance effective de nationalité française. La minuscule difficulté ici, c'est que le Cdt Moreau est né français de parents français, et n'a pas «acquis» la nationalité - il l'a de droit. Et de toute manière, seuls ceux ayant perpétré des délits grave ou des actes de terrorisme, sont susceptibles d'être déchus de nationalité. (24)

De facto, par contre, le Cdt Moreau est déchu de la nationalité française : puisqu'il n'a plus accès à ses actifs ou liquidités en Europe, y compris donc à ses biens immobiliers, et ne peut plus entrer sur le territoire européen - a fortiori, sur le territoire français, ne peut plus voir ses parents, n'exercera aucun des droits du citoyen français sauf - peut-être - voter à Moscou. La sanction excède celles infligées aux pires criminels de droit commun.

Le 31 octobre, le Membre du parlement européen dissident Michael von der Schulenburg a publié une opinion juridique qu'il avait sollicitée (25) relative à la légalité des sanctions dites «restrictives» contre des individus. On y apprend que les personnes physiques ou morales participant au gel des avoirs et actifs des «mécréants» désignés, ne peuvent être tenues responsables de malfaisance, sauf en cas de négligence avérée. Que le Conseil de l'UE s'est bien gardé d'encourager les nations sous sa coupe de lancer des procédures pénales contre les mécréants, puisque dans lequel cas, les différents traités et chartes protégeant tout accusé s'appliqueraient nécessairement ; que les sanctions contredisent en tout point la Charte des droits fondamentaux de l'UE (26) ; que le Conseil seul peut décider de l'opportunité de laisser suffisamment de fonds aux mécréants pour manger et se soigner ; que seuls le Tribunal européen de Justice et la Cour européenne des droits de l'homme (27) sont habilités à entendre des recours contre les sanctions, chose qui peut traîner sur des années. Il y aurait beaucoup plus à dire sur l'opinion sollicitée par von der Schulenburg, mais il nous faut arrêter là. Pour l'instant.

Dans l'espace de quelques mois seulement, nous avons perdu des gens de grande valeur, et aujourd'hui nous nous trouvons face à cette travestie du droit. Inutile de se morfondre, inutile de paniquer. Dans la stricte non-violence, la bataille continue.

 Mendelssohn Moses

Voir aussi :  regisdecastelnau.substack.com
 24heures.ch

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